Combattre la négrophobie ici, là-bas, partout!

« Vous aurez beau essayé d’enterrer l’ombre, vous ne l’empêcherez pas d’apparaitre. » 

Proverbe Wolof 

Le « Grand Remplacement », complotisme des imbéciles…

Le 21 février dernier, à l’issue d’une réunion du conseil de sécurité nationale, la présidence tunisienne dénonçait, via un communiqué, la présence de «hordes des migrants clandestins » qui seraient la source de «violence, de crimes et d’actes inacceptables».

L’immigration clandestine en Tunisie y était également décrite comme une « entreprise criminelle ourdie à l’orée de ce siècle pour changer la composition démographique de la Tunisie », afin de la transformer en un pays « africain seulement» et estomper son caractère «arabo-musulman ».

L’exacerbation des tenions ethno-religieuses est, on le sait, un subterfuge particulièrement prisé des élites dirigeantes soucieuses de se maintenir au pouvoir, par tous les moyens. Il s’agit d’une arme de division et de diversion massive visant a détourner les masses des problèmes économiques et politiques fondamentaux.

De ce point de vue, l’invocation de la théorie conspirationniste et mortifère du «Grand Remplacement», revêt, pour le président tunisien, un double avantage:

– Premièrement elle permet a Kais Saïed, empêtré dans une dérive répressive et autoritaire touchant plusieurs plans de la société tunisienne, d’éviter de rendre des comptes par rapport à un bilan économique et politique particulièrement désastreux. Les migrants (légaux ou clandestins) constituent ainsi le bouc-émissaire idéal pour un régime aux abois. 

– Deuxièmement, elle évite de pointer du doigt le rôle néfaste d’un acteur (plus puissant) dont la responsabilité dans les «crises migratoires» que connaissent beaucoup de pays sur le continent est pourtant accablante : l’Union européenne. 


Les déracinés du capital dans l’étau des politiques criminelles de l’Union européenne 

La destruction de la Libye par les forces OTANiennes (dont la France) a créé un chaos durable dans la région et provoqué l’exode de plusieurs dizaines de milliers de migrants, pour la plupart subsahariens, vers les pays voisins, dont la Tunisie. 

Or, pour limiter l’arrivée sur son territoire de migrants fuyant les accords économiques iniques qu’elle impose aux pays africains (à l’image des APE) ou les guerres qu’elle y déclenche (au nom de la « responsabilité de protéger » ou de la « guerre contre le terrorisme »), l’Union européenne sous-traite ses politiques migratoires criminelles à plusieurs État Africains, voire à des milices impliquées dans la traite d’êtres humains, comme en Libye. Le massacre de plusieurs dizaines de migrants au Maroc en juin dernier est également une manifestation de ce business macabre et xénophobe mis en place par l’Union européenne, avec la complicité de certains relais africains.


Le racisme anti-Noirs au Maghreb : une hostilité qui vient de loin 

La déclaration du président tunisien sur «les hordes de migrants» participant d’un complot visant a estomper le caractère «arabo-musulman» de la nation tunisienne a instauré un climat de terreur négrophobe et déclenché des agressions verbales et physiques visant non seulement des migrants subsahariens, mais aussi des citoyens tunisiens dont le seul tort est d’avoir la peau noire. 

Aussi, s’il convient de pointer du doigt la responsabilité de l’Union européenne dans la déstabilisation de la région et la mise en place de politiques migratoires criminelles sous-traitées par des pays africains, la déferlante négrophobe actuelle en Tunisie, qui touche indistinctement, des migrants (légaux ou illégaux) et des citoyens dont la présence en Tunisie remonte à plusieurs millénaires nous rappelle une triste réalité; celle du racisme visant les populations noires dans plusieurs pays d’Afrique du Nord. 

Ce racisme est antérieur à la colonisation et lui a survécu. Il est notamment l’héritage du commerce des esclaves, qu’il est important de rappeler, en dépit des tentatives d’ instrumentalisation de la part de ceux qui cherchent à relativiser l’horreur que fut la traite transatlantique.  

De nos jours, ce racisme est également perceptible à travers les représentations caricaturales des Noirs véhiculées par le cinéma, la télévision, les plateformes numériques. 

Ce racisme anti-Noirs, nous le retrouvons parfois, hélas, dans nos quartiers. Si nous voulons être conséquents et cohérents, nous nous devons de le dénoncer et le combattre. 


Combattre la négrophobie ici, là-bas, partout!

Héritière des luttes menées par plusieurs générations d’immigration en France, le Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP) place au coeur de son engagement le combat contre le racisme et l’impérialisme. Pour être efficace dans ce combat, il convient, comme le disait Amilcar Cabral, de combattre nos propres faiblesses et de ne pas faire croire aux Victoires faciles. Le FUIQP dénonce avec la dernière énergie les déclarations négrophobes du président tunisien ainsi que les agressions visant les migrants subsahariens et les citoyens tunisiens noirs.

Nous saluons l’action des personnes et collectifs qui, en Tunisie et en France, se mobilisent contre ce racisme d’Etat.

Ensemble, il nous faudra poursuivre le combat contre la négrophobie ici, là-bas, partout.


S’unir pour ne pas subir!


Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires

3/02/2023