Rappelons nous que c’est la convergence des coups qui a consolidé la convergence des luttes et les victoires historiques de nos anciens.
« L’oiseau qui oublie le nid où il a vu le jour finit par s’égarer ».
Ce célèbre proverbe wolof nous rappelle à quel point la connaissance de notre propre histoire ainsi que la fidélité aux combats menés par nos anciens, sont des éléments indispensables à la compréhension des défis du présent. C’est sur la base de cette compréhension que nous pourrons définir les formes d’organisation et de lutte qu’il convient d’adopter afin de faire avancer notre combat pour l’égalité, la dignité et la justice.
Le Front des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP) a vu le jour en 2011, à l’initiative de militantes et de militants qui n’ont pas oublié et ne peuvent oublier le nid où ils/elles ont vu le jour.
Ce nid, c’est celui de plusieurs générations d’immigrés et de fil-le-s d’immigrés qui n’ont cessé de se battre, malgré les répressions, les campagnes de diabolisation et d’intimidation, pour défendre leur dignité.
Ce nid, c’est également celui des chibanis, des dockers noirs de Marseille, des « tirailleurs sénégalais », des « boat people » et de tous ces « déracinés du capital », avec ou sans papiers ; ces exilés ayant passé leur vie à explorer d’autres contrées, afin d’offrir à leur progéniture un avenir meilleur.
Ce nid, c’est enfin celui des organisations qui dans l’immigration ont lutté contre le racisme en France et pour la libération nationale des peuples colonisés : de l’Étoile Nord-Africaine dans les années 1920-1930 au Mouvement de l’Immigration et des Banlieues (MIB) dans les années 1990-2000, en passant par la fédération de France du FLN dans les années 1950-1960, le Mouvement des Travailleurs Arabes (MTA) dans les années 1970 ou la Marche pour l’égalité de 1983.
Et c’est en dignes héritiers des luttes des immigrations, que nous nous sommes toujours attachés à créer des ponts entre les anciennes et les nouvelles générations d’immigrés en France ; entre les habitants des quartiers populaires, dont beaucoup sont nés et/ou sont devenus citoyen-ne-s français et les immigrés dits « illégaux », que la société condamne à une vie dans la marginalité et la clandestinité.
Dès ses débuts, le FUIQP a fait de l’accès de tous les immigrés, quelle que soit leur situation administrative, à une égale dignité, un des principes cardinaux de son engagement politique.
« Nous voulons la régularisation de tous les sans-papiers et une citoyenneté commune et égale pour tous », proclame ainsi fièrement le premier des 10 points de notre organisation.
Au cœur de notre engagement, figure la conviction que les habitants des quartiers populaires partagent, avec les résidents de l’Ambassade des migrants, une communauté de destin.
Ce destin commun, c’est celui des populations considérées comme des envahisseurs, des « Grand-Remplaçants » menaçant l’équilibre démographique et l’identité de la France
Ce destin commun, c’est celui des victimes des crimes policiers, des discriminations massives sur les marchés du logement de l’emploi, ect…
Ce destin commun, c’est aussi celui des minorités livrées à la vindicte populaire par des « marchands de haine » ayant fait de la diabolisation des populations non blanches un fonds de commerce inépuisable, ainsi qu’un argument de campagne électorale, comme l’a démontré la dernière campagne présidentielle.
Parce que les discours et les politiques racistes affectent nos vies de manière spécifique, nous devrons y répondre à notre façon, avec nos mots, en partant de nos réalités et en construisant des mobilisations avec les alliés respectueux de nos droits
A l’occasion de cette journée de solidarité avec les résidents de l’Ambassade des migrants, le FUIQP souhaiterait ainsi réitérer sa volonté de participer à la construction d’une maison commune de l’antiracisme ; une maison que nous bâtirons ensemble, en tirant les leçons du passé, sans oublier le nid où nous avons vu le jour.
Dans ce combat, nous remporterons des victoires mais nous essuierons également des défaites ; des défaites sur lesquelles nous nous appuierons pour mieux avancer.
En effet, comme nous le rappelait le combattant anticolonialiste et héros de l’indépendance de la Guinée Bissau et du Cap Vert, Amilcar Cabral dans un célèbre discours prononcé en 1970:
« la lutte est faite , de victoires et de défaites mais elle avance toujours, et ses phases, même les plus semblables ne se répètent jamais. Parce que la lutte est un processus et non un accident, elle est une course de fond et non de vitesse : des défaites éventuelles ne sauraient justifier ni la démoralisation, ni le désistement, car même les échecs peuvent être une base de départ pour de nouveaux succès. »
Pour conclure, mes chers amis, j’aimerais rappeler cet avertissement que le grand historien et militant anti-impérialiste Joseph Ki-Zerbo lançait à la jeunesse burkinabé en 1998 : « si nous nous couchons, nous sommes morts ! »
Si aujourd’hui, nous nous couchons devant les discours et les politiques xénophobes, nous sommes morts !
Pour cette raison, le FUIQP réitère son soutien au Collectif Chapelle Debout ! et aux résidents de l’Ambassade des Migrants.
Je vous remercie.
Intervention de FUIQP Paris-Banlieue lors du meeting de soutien à l’Ambassade des immigrée-e-s
Paris, 28/05/2022