DÉCLARATION DU FUIQP
Les dernières mobilisations contre la loi sur la « sécurité globale » et la loi « confortant les principes républicains » sont un miroir grossissant des contradictions qui traversent le mouvement social aujourd’hui.
Elles sont en effet caractérisées par une double tendance réductrice :
- La tendance de certaines organisation à réduire la lutte contre la « sécurité globale » à la seule remise en cause de l’article 24 [ parfois réduit même à la seule question de la liberté de la presse]
- La tendance à réduire la lutte actuelle à la seule loi sur la « sécurité globale » c’est-à-dire à occulter et invisibiliser la loi sur le « séparatisme » de l’agenda des mobilisations.
Au passage ce qui disparaît c’est la place particulière des attaques contre les immigrations, leurs descendants français et plus largement les habitants des quartiers populaires… Une nouvelle fois les luttes et les oppressions sont hiérarchisées et certaines d’entre elles sont silenciées. En témoigne l’absence de la signature de nombreuses organisations politiques, syndicales et associatives dans les appels à la manifestation contre la loi sur le séparatisme alors qu’elles étaient toutes présentes aux mobilisations antérieures contre la loi sur la sécurité globale.
Nous faisons ce triste constat à un moment où la peur et la tétanie se développe dangereusement chez les musulmans ou supposés tels.
L’ampleur des attaques islamophobes subies [dissolutions d’associations, perquisitions, menaces sur les financements associatifs, discours publics et médiatiques sur l’ensauvagement ou la sécession, etc.) et la faiblesse des réactions publiques et politiques suscitent un sentiment d’isolement et d’abandon porteur de conséquences importantes sur les conditions de luttes futures.
Un tel contexte est de fait un encouragement pour le gouvernement actuel à centrer l’ensemble de la campagne présidentielle qui s’annonce sur les pseudo « problème de l’immigration », sur la supposée «menace islamiste », sur les prétendus « communautarisme » et « sécessionnisme » menaçant des soi-disant « territoires perdus de la République », etc. Bref à faire d’une partie de la population définie par un marqueur d’origine, de couleur ou de religion un bouc émissaire servant de dérivatif aux colères sociales montantes.
Nous constatons également que certains responsables de ces organisations, aujourd’hui absentes de la mobilisation contre la loi sur le séparatisme, n’ont pas de mal à reprendre les argumentaires gouvernementaux quand il s’agit de se positionner sur l’islamophobie – notamment en se cachant derrière une laïcité totalement dévoyée pour occulter le développement d’une islamophobie d’Etat. Ces constats amers nous les faisons au moment où sont dissoutes, menacées de dissolution ou poussées à la dissolution plusieurs associations. Ces violations du droit à l’organisation collective d’une catégorie de citoyens, n’ont pas non plus donné lieu à de véritables mobilisations collectives.
L’islamophobie d’Etat n’est pas une question secondaire dans notre pays. L’occulter des mobilisations actuelles revient de fait à l’encourager. Alors que l’ensemble des projets de loi et des mesures actuels font système (sécurité globale, séparatisme, loi de programmation de la recherche, décrets sur les fichiers Pasp et Gipasp étendant le fichage policier aux « opinions politiques », etc.), l’occultation du versant islamophobe de la politique actuelle est porteuse une nouvelle fois de divisions profondes qui seront longues à résorber une fois installées. Le tournant autoritaire et sécuritaire du pouvoir qui caractérise notre actualité ne pourra pas être efficacement combattu en masquant une de ses principales cibles, les musulmans ou supposés tels. L’unité militante suppose la clarté.
Le Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires appelle:
- À multiplier les initiatives contre la loi sur les pseudo-séparatismes en l’articulant aux autres attaques que nous subissons et en particulier à la loi sur la sécurité globale ;
- A dénoncer publiquement tous les silences, tergiversations, euphémisations concernant l’islamophobie d’Etat et l’exigence du retrait total de la loi sur le séparatisme ;
- A s’organiser dans chaque ville et quartiers de façon autonome afin de ne pas être les dindons de la farce d’une « convergence » conçue comme une négation des attaques que nous subissons, tout en construisant les mobilisations avec les alliés respectueux de nos droits.
Comme le disait Aimé Césaire il s’agit pour nous de « ne pas confondre alliance et subordination ».
Décembre 2020
Télécharger la déclaration « Convergence des luttes » : Déclaration Convergence des luttes 2020 FUIQP
Télécharger l’affiche « Convergence des luttes » : Affiche convergence des luttes 2020 FUIQP