Tirons les leçons, sortons des postures

Reprenons l’initiative

Le verdict des urnes est tombé. Si le pire a été évité, le diagnostic de la société française que révèlent les résultats est alarmant et lourd de menaces pour les classes populaires en général, pour les immigrés et les héritiers de l’immigration immédiatement. Le racisme est en particulier l’islamophobie se sont profondément enracinés, l’idée de l’existence d’une cinquième colonne et/ou d’un ennemi de l’intérieur imbibe désormais une part importante de la société française et de ses classes populaires, l’attente d’un pouvoir musclé pour réprimer cette « colonne » et cet « ennemi » n’est plus marginale. Bref le racisme d’en haut, politique et médiatique s’est durablement, après plusieurs décennies de matraquage descendant, transformé en racisme d’en bas.

Une telle situation est d’autant plus dangereuse pour nos vies et celles des nôtres que nous sommes dans une société qui reste imbibée de plusieurs siècles d’esclavage et de colonisation, que nous sommes dans une séquence historique de crise de l’impérialisme français en Afrique, que nous vivons une période inédite de crise de légitimité et de représentativité du pouvoir, que cette période est aussi marquée par une désorganisation et un éparpillement des forces militantes progressistes en général et issues de l’immigration et des quartiers populaires plus particulièrement.

Nul besoin d’être devin pour prédire une libération de la parole et des agressions racistes, l’approfondissement d’une logique du droit inégal [entre français et immigrés ; entre les « vrais français » et les « français de papier »], d’une citoyenneté de plus en plus explicitement à plusieurs vitesse, d’une conception sanguine de la nation remettant en cause de plus en plus ouvertement le droit du sol, etc.

Face à ce diagnostic de quelles forces disposons-nous ? Les associations et organisations de l’immigration et des quartiers populaires sont éparpillées, groupusculaires, enfermées dans des querelles, des clivages, des concurrences, des postures, des besoins de reconnaissances, etc., qui empêchent toute réaction politique et stratégique commune viable. Nous sommes de ce fait fréquemment beaucoup plus violents entre nous que face à nos adversaires et même nos ennemis.  

La conséquence en est que nous sommes incapables de peser sur le rapport de forces politiques ce qui conduit à une histoire qui s’écrit sans nous c’est-à-dire contre nous. Alors que les héritiers de l’immigration et des quartiers populaires constituent près de 30 % des classes populaires de France,, notre parole est absente.  Alors que les révoltes des quartiers populaires de 2005 à 2023 illustrent l’ampleur de la rage et de la colère contre les violences policières, le racisme d’Etat [et l’Islamophobie d’Etat en particulier], les discriminations racistes systémiques [à l’accès et dans l’emploi, au logement, etc.], le soutien scandaleux à l’Etat génocidaire d’Israël, etc., elles ne trouvent aucun débouché politique et organisationnel susceptible d’influencer le rapport des forces.

Les résultats inquiétants de ces législatives ne changent rien à notre place objective dans cette société et aux conséquences politiques qui en découlent. Hier comme aujourd’hui, avant ou après les législatives nous restons massivement membres des classes populaires et partageons avec eux des intérêts de classes. Hier comme aujourd’hui nous sommes cependant toujours à une place particulière au sein de ces classes populaires [marquée par la surexploitation, les oppressions racistes spécifiques, les dangers quotidiens pour notre intégrité physique, etc.] qui rend nécessaire une organisation et une parole autonome sans lesquelles nos intérêts seront évacués de l’agenda politique, nos revendications invisibilisése et silenciées, notre dignité bafouée, nos vies en danger, etc.   

C’est pourquoi le FUIQP appelle à la fois à ne pas sombrer dans la tétanie, la paralysie, le nihilisme ou la posture du spectateur donneur de leçons d’une part et à sortir des postures d’affichage et de monopole d’autre part. Le mouvement autonome des immigrations et des quartiers populaires ne peut avoir qu’une structuration de front articulant diversité et unité, aussi divers que l’immigration et les quartiers populaires, aussi uni que le sont les intérêts des groupes sociaux et fractions de classes qui sont les nôtres. Pour cette raison nous appelons à organiser en commun des « Rencontres nationales de l’Immigration et des Quartiers Populaires »  afin de formuler les axes stratégiques nous permettant de nous « Unir pour ne plus subir ».

Communiqué du Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires

10/07/2024

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